Changement climatique – un « GIEC » régional ? Oui, trois fois oui

La Région des Pays de la Loire a lancé en 2020 un démarche originale de GIEC régional, inspiré du nom du panel intergouvernemental éponyme mais qui n’a aucun lien officiel avec lui, hormis la méthode scientifique et interdisciplinaire.

Certains esprits chagrins, comme dans cet article de TF1, hurlent à l’appropriation et à l’imposture, au risque de passer sous silence les recommandations stimulantes de ce 2ème rapport, disponible ici.

Je ne pense pas utile de revenir sur cette polémique stérile car la méthodologie pilotée par le Comité 21 présente tous les gages de sérieux.

En revanche, certaines préconisations doivent absolument être débattues, et pas seulement dans l’hémicycle régional. 

Tous les territoires de la région sont concernés, au premier chef notre belle capitale régionale, j’ai nommé Nantes !

Emissions de carbone = objectif -6% par an !

copyright @michel Labelle

L’objectif est ambitieux mais cohérent avec la cible nationale et les schémas en vigueur (SRADDET). Pour l’atteindre, il faut savoir d’où l’on part et de quoi l’on parle et mobiliser les acteurs ; le rapport fait donc plusieurs propositions sur la formation, la poursuite de la recherche scientifique ou encore une conférence régionale annuelle sur le sujet.

Bon, j’avoue que c’est la partie qui me parle le moins : on meurt de l’excès de schémas territoriaux, de conférences et autres groupes de travail. La comitologie et la réunionnite sont des maladies bien françaises et leur efficacité est souvent inversement proportionnelle à leur coût et leur durée.

Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain… Il y a beaucoup de choses à garder dans ce rapport.

  • En matière de formation et sensibilisation, évitons les plaidoyers lénifiants ou donneurs de leçon. Diffusons des démarches comme la Fresque du Climat, à laquelle j’ai participé pendant ma campagne législative et qui permet à un public non expert d’appréhender très concrètement la chaîne des causes et des effets du changement climatique.
  • l’idée d’un « contrat territorial climat » est séduisante. Elle permettrait de faire redescendre l’analyse au niveau des intercommunalités et de lier leurs enjeux locaux avec les enjeux plus globaux.
  • En revanche, le Plan régional de transformation de l’économie et de l’emploi me semble inutile. Il existe de puis la loi NOTRe de 2016 un schéma régional de développement économique (le joli signe de SRDEII !) qu’il faut transformer pour qu’il soit 100% climato-compatible ! Trop de plans tuent le plan…

Consommation énergétique et électrification massive : le dilemme

source rapport GIEC régional PDL 2023

Le chapitre sur la réduction de la dépendance aux énergies fossiles démarre par ce graphique qui me laisse sceptique.

En effet, cet objectif de réduction massive (-40%) de notre consommation énergétique est louable (via l’efficacité et la sobriété énergétique) mais est-il réaliste quand on réfléchit à l’électrification massive à venir de nos usages (transports, industrie, bâtiment, etc.) ?

Pour dire les choses simplement, si on veut enrayer rapidement les émissions de carbone, le plus urgent n’est-il de substituer des sources d’énergies propres (renouvelables ET nucléaire, évidemment) aux énergies fossiles (fioul charbon, gaz) ?

Et à ce sujet, le rapport est muet sur la déconcentration nécessaire de la production d’énergie dans notre région, plus proche des consommateurs, avec moins de pertes en ligne. Rien non plus sur des filières énergétiques prometteuses où les Pays de la Loire font pourtant la course en tête (énergies marines renouvelables, hydrogène, biomasse, etc.)

Dans une région aussi industrielle que la nôtre et qui gardera une forte dynamique démographique (donc de la construction, des déplacements), je trouve ce scénario à -40% de consommation très peu réaliste.

 

Méga-Bassines : de vraies questions qui ne justifient pas la violence

copyright @FRANCK DUBRAY / MAXPPP

L’indépendance du GIEC régional a été démontrée puisqu’il se prononce (avec raison selon moi) contre les méga-bassines quand elles sont remplies par pompage des nappes phréatiques ; tout en reconnaissant l’intérêt des retenues collinaires qui stockent les eaux de ruissellement et constituent une bonne « assurance sécheresse ».

J’ai souvenir du même phénomène au Mexique où les fruits et légumes sont produits de façon absurde par pompage des nappes dans les Etats les plus secs (au Nord ouest du pays) alors que les Etats du sud (Chiapas, notamment) regorgent d’eau et importent la plus grande part de leurs fruits et légumes ! L’histoire et les traditions agricoles ne peuvent pas toujours justifier le statu quo quand la pénurie d’eau s’accélère.

Ceci étant dit, rien ne peut justifier la violence qui s’est déchaînée contre les projets de méga-bassines dans les Deux-Sèvres.

Alimentation et agriculture : on reste sur sa faim !

Les chapitres sur l’alimentation et l’agriculture sont un catalogue de bonnes intentions et ne font peu de cas des spécificités ligériennes qui appellent des réponses adaptées. A les lire, et en forçant le trait, on a l’impression que l’agriculture ligérienne devrait se contenter de nourrir sa population or nous pouvons rester une région exportatrice de produits agricoles qui soient plus « durables » !

Ce qui est dit sur l’évolution nécessaire de l’élevage, l’agroforesterie, sur la substitution des intrants importés et/ou chimiques, sur l’agroécologie est très clair, bien que peu détaillé (quels arbitrages, priorités, moyens pour y arriver ?)

Bref, ce rapport est une belle base de travail pour une écologie ligérienne qui concilie sobriété et compétitivité, protection de la planète et anticipation des futurs usages.

Alors, yapuka !

Foulques Chombart de Lauwe

Etiquettes : climat, environnement, politique, région
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