Dès mercredi soir, le microcosme nantais bruissait de l’étonnante nouvelle : Johanna Rolland aurait décidé d’arrêter le projet d’Arbre aux Hérons… Etonnant s’agissant du projet culturel (ou touristique ?) phare de son mandat. S’agit-il de l’aboutissement logique d’un projet mal ficelé, ou, comme elle le laisse entendre, d’un choix courageux pour faire face à la crise « sociale et écologique » ? Comme souvent, la vérité est ailleurs.

Urgence écologique, vous dites ?

La seule urgence écologique qui motive ce renoncement XXL, c’est la pression impitoyable que la frange dite « verte » de sa majorité fait subir à Johanna Rolland. Avec un PS à 1,8% et une alliance NUPES où les écolos se sont taillé la part du lion, Johanna doit impérativement donner des gages pour essayer d’être sur l’affiche en 2026.

Je t’aime, moi non plus. Copyright @FRANCK DUBRAY / OUEST FRANCE

Arborant son sourire des grands jours, Julie Laernoes avait bien du mal à cacher son triomphe dimanche sur France 3. Les khmers verts nantais ne voulaient pas de cet arbre d’acier sous le cagnard de Misery, Johanna a donc cédé ! Comme pour feu l’extension de la Cité des Congrès, souvenez-vous, qui a fait les frais de l’accord électoral PS/EELV de 2020.

A Nantes, la décroissance, c’est maintenant ! 

C’est pour votre pouvoir d’achat, M’sieurs Dames…

C’est, je crois, mon explication préférée. Pour rappel, en 2022, malgré l’impact avéré du COVID sur le budget des Nantais les plus fragiles, la majorité de Johanna Rolland a décidé d’augmenter la taxe foncière et la taxe déchets, ainsi que les tarifs du périscolaire, d’étendre le stationnement payant, et j’en passe.

Donc ce serait le pouvoir d’achat des Nantais qui justifierait cette décision ? Vaste blague.

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32 / 54 / 80 millions, qui dit mieux ?

Pour ma part, je salue l’extraordinaire numéro de Tartuffe de notre (très) chère Maire sur l’explosion des coûts. Quand nous osions évoquer ce point quand le budget passa l’an dernier de 32 à 54 M€, on nous regarda de haut sur le thème du « Quoi qu’il en coûte… » pour les Nantais !

Le rêve, surtout quand il fait vivre les copains, ça n’a pas de prix, vous comprenez. 

Comment expliquer qu’à 54 M€, ça passe, mais plus à 80 ? Quel est le seuil psychologique qui a été franchi ? Le grand argentier de la métropole, Pascal Bolo, dit même que « 80 M€, c’est une paille dans le budget de Nantes métropole ».

Une paille dont beaucoup se feraient bien une cabane, comme le petit cochon de l’histoire…

La bonne gestion consistait à demander aux concepteurs de l’Arbre ce qu’il pouvaient faire pour 32 M€. Et si ce n’était pas possible, de revoir le concept. Mais à Nantes, ça ne se passe pas comme ça ! Le rapport de la Chambre régional des comptes sur le spectacle vivant s’en émouvait déjà en 2014. 

Un « jeu à la nantaise », toujours avec les mêmes joueurs

La vérité, c’est que le montage juridique et financier de cette affaire est vicié depuis le début. Si le talent créatif des créateurs des Machines de l’Ile n’est plus à démontrer, leur talent contractuel semble s’essoufler. Sous Jean-Marc Ayrault comme Johanna Rolland (ante 2022 !), on leur a laissé penser qu’ils avaient en quelque sorte carte blanche.

C’était le « jeu à la nantaise », mais avec très peu de joueurs.

Ils ont été un peu déstabilisés quand il s’est agi d’exporter le concept des Machines à Toulouse ou Calais : soudain, on leur demandait des comptes, on parlait d’appels d’offres, les budgets étaient regardés de près… La construction du Carrousel des Mondes marins, qui a récemment mené à la mise en examen de l’ex-dircab de Jean-Marc Ayrault, proche parmi les proches, a aussi sonné comme une alerte. En prenant sa décision d’arrêter l’Arbre aux Hérons, Johanna Rolland avait tout ça en tête, beaucoup plus que l’urgence écologique.

Mais sachez-le, c’est « l’obligation de passer des appels d’offre qui va renchérir le projet de 15 M€ ». Si, si. Vous avez bien lu. A Nantes, la mise en concurrence, ça fait exploser le budget. Il faudra m’expliquer. On n’a pas dû suivre les mêmes cours d’économie. 

Johanna Rolland, machine à rater les projets

Elue en 2014 puis 2020, Johanna Rolland est légitime à porter des grands projets. Certains me semblaient plus nécessaires que d’autres (une belle rénovation de la Beaujoire, par exemple), mais là n’est pas la question.

Ce qui est inquiétant, c’est qu’avec ses alliés décroissants, Johanna Rolland laisse capoter ou stagner tous les grands projets qu’elle lance ou soutient (NDDL, Yellow Park, extension de la Cité des Congrès, parking place de la Petite-Hollande, desserte ferroviaire).

Et en matière culturelle, en dehors de la modernisation du Musée des (beaux) Arts, on attend toujours.

De l’oxygène et du courage, vite !

Vous l’avez compris, la vie culturelle nantaise a besoin d’oxygène. Notre groupe d’opposition demande que le budget initial (17 M€ pour sa part publique) serve à un grand appel à projet. Les artistes et créateurs de talent ne manquent pas à Nantes et en France. Laissons-les nous surprendre comme Nantes a su le faire avec Jean Blaise et les Allumées ou Royal de Luxe dans les années 90 !

Notre vie politique a besoin de courage et de constance. Pour cela, j’ai peur qu’il faille attendre 2026 et nous mobiliser tous pour un vrai changement !

Foulques Chombart de Lauwe

Etiquettes : culture, Finances, nantes, politique
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